Création du camp

Prévu dès le printemps 1938, le camp d’Argelès-sur-Mer est monté dans l’urgence le 30 janvier 1939.    

Le camp d’Argelès-sur-Mer est créé à la surprise générale des habitants et de la municipalité. Le maire de la commune, Frédéric Trescases, est averti le 29 janvier 1939, par un commandant et un capitaine des gardes mobiles, de la mise en place d’un camp prévu initialement pour quelques milliers de réfugiés. Le lendemain, un détachement de 90 gardes mobiles arrive sur la plage accompagné d’une centaine de réfugiés espagnols chargés d’installer les fils de fer barbelés. Le 1er février 1939,  Albert Sarraut, ministre de l’Intérieur et Marc Rucart, ministre de la Santé publique, visitent le site en construction en compagnie de journalistes de La Dépêche du Midi. Albert Sarraut annonce officiellement la création du camp : « Le camp d’Argelès-sur-Mer ne sera pas un lieu pénitentiaire, mais un camp de concentration. Ce n’est pas la même chose ».  

Les premières installations consistent à planter des centaines de poteaux en les ceinturant de barbelés. Fin juin 1939, selon les rapports des commandants du service de l’aménagement des camps, ce sont 200 kilomètres de barbelés qui sont déroulés autour du camp d’Argelès-sur-Mer. A partir du 6  février 1939, le flux de réfugiés qui sont envoyés sur la plage d’Argelès-sur-Mer ne va pas s’interrompre. Le camp est directement relié à deux principaux points de passage des réfugiés civils et militaires : Cerbère et Le Perthus. Les femmes, enfants et vieillards sont majoritairement évacués. Les blessés sont transférés dans des centres de soin comme ceux installés sur deux navires-hôpitaux à Port-Vendres pour les cas plus graves. Les hommes, eux, sont dirigés vers le camp  d’Argelès-sur-Mer puis vers le camp voisin de Saint-Cyprien. 

Les arrivées sur cette plage au décor lunaire s’effectuent de manière massive avec des convois d’hommes affluant depuis la frontière selon les instructions du plan de barrage du général Falgade. Ces convois, encadrés par la troupe française, n’excluent pas l’arrivée de réfugiés isolés ainsi que de femmes et d’enfants qui rejoignent aussi la plage d’Argelès-sur-Mer. Ces derniers sont majoritairement placés dans un ilôt dédié puis isolés dans un camp séparé de ceux des hommes. Après la fermeture de la frontière, les convois proviennent essentiellement des camps provisoires situés en Vallespir.  

Un camp pensé dès le printemps 1938

Dès avril 1938, le gouvernement d’Edouard Daladier a cherché des emplacements pour rassembler d’éventuels réfugiés espagnols en cas de rupture du front de Catalogne.  Le 29 avril 1938, le ministre de la Guerre envoie une note, classée secrète, aux commandants des 16ème et 17ème régions militaires leur demandant de prévoir « l'installation de camps de circonstance pour certaines catégories de réfugiés espagnols ». Dans les Pyrénées-Orientales quatre sites sont choisis en mai 1938 dont trois sur le littoral (Canet, Saint-Cyprien et Argelès-sur-Mer) et un en montagne (Matemale). Dans ce dispositif, seuls Saint-Cyprien et Argelès-sur-Mer ouvrent en février 1939. Ces deux derniers sites présentent l’avantage d’offrir de longues et larges plages de sable à l’écart des zones d’habitation.