Antonio de la Fuente

Témoignages

Du camp d'Argelès-sur-Mer à celui de Rivesaltes

Antonio de la Fuente quitte Puigcerda le 31 janvier 1939. Il est transferé au camp de Verdun, à Rennes, jusqu’au mois de septembre 1939. Puis c’est le retour dans les Pyrénées-Orientales avec un premier internement au camp de Saint-Cyprien (septembre-décembre 1939), à Argelès-sur-Mer (décembre 1939-juin 1940), à Bram (juin-novembre 1940), de nouveau à Argelès-sur-Mer (novembre 1940 - juillet 1941), à Rivesaltes (juillet 1941-novembre 1942) puis à Gurs (novembre 1942-mai 1943). Antonio de la Fuente sera ensuite envoyé dans des centres d’accueil où il restera jusqu’à la Libération.

On est arrivé à Argelès et là, les baraques étaient en très mauvais état parce que c’était très léger, c’était de la volige avec une couverture  en carton goudronné. Les baraques avaient une forme un peu spéciale : les parois de la partie supérieure étaient verticales, mais à la base, elles étaient inclinées. C’est là-dessous, où on dormait, nous, puisqu’il y avait juste une petite allée centrale. Et quand le vent soufflait, la Tramontane, suivant l’orientation qu’avait la baraque, le sable s’accumulait sur cette partie en pente, et comme elle n’était pas assez résistante, ça écrasait, on s’est retrouvé à plusieurs reprises recouverts de sable dans la nuit. Ca arrivait souvent. Déjà par temps normal, lorsque la tramontane soufflait, le matin, on était recouvert de quelques centimètres de sable. Mais là  il a fallu fouiller pour libérer les enfants surtout et des personnes âgées. Ça c’est pour dire.

A l’intérieur même de ces camps, y’avait un principe, c’est qu’on nous changeait d’îlot et non seulement ça, dans le même îlot, on nous changeait de baraque. Y’avait une responsable de baraque. Ma tante qui était célibataire, a occupé ce rôle plusieurs fois, parce qu’il fallait une personne qui soit disponible, qui n’ait surtout pas d’enfants. C’est elle qui allait chercher la nourriture aux cuisines centrales, etc. Ma tante donc, s’occupait de notre baraque. Alors quand on nous transférait d’un îlot à un autre ou à une autre baraque, y’avait un système. La responsable de baraque disait : « A partir de cinq heures de l’après-midi, tout le monde doit être devant la baraque avec vos affaires ». Et puis on nous faisait attendre et ça se passait surtout à la nuit tombante, le déménagement se faisait toujours à la nuit tombante, jamais en plein jour. Pourquoi ? Je n’en sais rien. Parce que peut-être c’était le principe. C’est vrai que ce principe nous choquait beaucoup. Nous sommes restés donc dans ce fameux camp d’Argelès où il y avait de la vermine, y’avait de tout, les rats… etc
Et en 1941, un nouveau départ. Direction Rivesaltes. Là, c’est toujours pareil : on faisait la marche du camp jusqu’à la gare, on montait dans ces fameux wagons et puis direction Rivesaltes.

Extrait de la transcription du témoignage de Antonio de La Fuente réalisé le 12 février 2008Réalisation entretien : José Jornet / Transcription : relecture et corrections finales par Programme Matrice / © Collections du Mémorial du Camp de Rivesaltes  

Antonio de la Fuente avec sa soeur au camp de Rivesaltes.

Antonio de la Fuente avec sa soeur au camp de Rivesaltes. © Collection privée.